Ce n'est pas encore Jurassik Park mais c'est une avancée décisive. Au point qu’on pourrait bientôt voir ce qui ressemblera à un mammouth arpenter la steppe de Sibérie. « Ressemblera » seulement car la technique utilisée par le scientifique George Church et son équipe est différente de tout ce qui a été tenté jusqu’à présent. Plutôt que de recréer entièrement l’ADN du mammouth, Church a choisi une voie intermédiaire.
Il y a peu, les manipulations génétiques comportaient toujours une part d’imprécision, donc d’inconnue. Grâce à une technique de séquençage relativement récente appelée CRISPR, on peut désormais modifier précisément un ou plusieurs gènes, voire un génome entier. C’est la piste empruntée. Non pas pour cloner un mammouth stricto sensu, mais pour modifier l’ADN d’un éléphant d’Asie et le doter de certaines caractéristiques de l’animal préhistorique. « Les deux espèces sont plus proches l’une de l’autre qu’elles ne le sont de l’éléphant d’Afrique, affirme George Church. Pour l’heure, le but n’est pas de recréer un mammouth parfait. C’est de rendre des animaux extrêmement résistants au froid. »
Or, pour qu’une population d’éléphants d’Asie puisse espérer survivre dans un environnement où la température descend parfois à - 50 °C, de quoi a-t-elle besoin ? Des capacités de résistance polaire que possédaient les mammouths. CQFD. « Nous avons privilégié des gènes associés à la résistance au froid comme ceux produisant des longs poils, la taille des oreilles, les couches de graisse et surtout l’hémoglobine, la molécule du sang permettant le transport de l’oxygène dans l’organisme », a détaillé le scientifique dans son compte rendu d’étude.
D'ici à 2018, des éléphantes d'Asie porteuses seront inséminées
Pour l’heure, l’expérimentation reste confinée au stade laboratoire mais d’ici à 2018, des éléphantes d’Asie porteuses seront inséminées dans l’espoir de voir naître, vingt-deux mois plus tard, non pas de vrais mammouths mais des éléphants d’un genre nouveau, possédant leurs caractéristiques de résistance au froid. Et on leur a déjà trouvé un enclos : le Pleistocene Park, en Sibérie. Un espace de 16 kilomètres carrés où ces hybrides pourraient évoluer en semi-liberté. Avant que cela ne devienne un parc d’attractions, bien évidemment.
Le mammouth, plus important que la Cop 21 ?
Selon Church, repeupler la toundra sibérienne de mammouths pourrait sauver la planète ! En tout cas, atténuer les conséquences du changement climatique dans une région où la fonte du permafrost est une bombe à retardement. Les mammouths présenteraient l’avantage de pouvoir se nourrir de l’herbe « morte », permettant ainsi au soleil d’atteindre l’herbe fraîche dont les racines préviennent l’érosion. En outre, ils nettoieraient les alentours des arbres qui ont poussé depuis et absorbent trop les rayons du soleil. Enfin, leurs déplacements balayeraient la neige, ce qui permettrait à l’air froid de pénétrer dans le sol et d’en abaisser la température.
Source : Paris-Match.