par giradaire » Jeudi 05 Mai 2011 18:58
Un accord vient d’être signé à Londres entre la Chine et l’Ecosse pour le transfert d’un couple de grands pandas vers le zoo d’Edimbourg. Un accord hautement diplomatique et écologique, selon les responsables du projet. Une décision très discutable selon certaines ONG.
Tian Tian et Yangguang, un couple de grands pandas nés en 2003 dans un centre d’élevage en Chine, pourront bientôt être admirés par les visiteurs du zoo d’Edimbourg (Ecosse, Royaume-Uni) : tels sont les termes de l’accord signé très officiellement, en présence de hauts dignitaires des deux pays, entre la Société royale écossaise de zoologie (RZSS) et l’Association chinoise pour la conservation de la vie sauvage.
"C'est un grand jour pour la RZSS, le Zoo d'Edimbourg, le Royaume-Uni et la Chine (…). Le projet représente un énorme bénéfice pour le Royaume-Uni et l'Ecosse, tant pour le soutien de la conservation du panda géant que pour l'amélioration de nos programmes éducatifs et pour la science", affirme David Windmil, directeur du zoo. "Les pandas sont un trésor national chinois. Cet accord historique est un cadeau de la Chine au peuple du Royaume-Uni", renchérit Liu Xiaoming, ambassadeur de Chine outre-Manche.
Cependant, Ross Minett, responsable scientifique à l’ONG OneKind, se pose la question de la pertinence de cette tentative de faire se reproduire des pandas en captivité, si loin de leur habitat naturel. "C'est une affaire commerciale : ces animaux apparaissent comme un cadeau diplomatique, mais en fait le zoo payera de substantiels droits pour pouvoir les exhiber. Les organisations internationales comme le WWF privilégient plutôt une approche qui protège l'habitat du panda et permet à sa population naturelle d’augmenter, et si le Zoo d'Edimbourg est sérieux sur le plan de la conservation, il devrait donner son soutien à des projets locaux en Chine", a-t-il fait remarquer.
Et un autre son de cloche ....
La Vie
jeudi 5 mai 2011
Ecologie
Une raffinerie de pétrole vaut deux pandas
Olivier Nouaillas -
Ou l'histoire d'un drôle d'accord commercial conclu entre la Chine et la Grande-Bretagne pour consolider l'avenir d'une raffinerie en Ecosse.
La nouvelle est passée presque inaperçue, sauf des lecteurs attentifs des colonnes du Guardian, l'excellent quotidien de centre-gauche britannique, particulièrement vigilant sur les questions environnementales. La semaine dernière, raconte le journal, le vice-premier ministre chinois Li Keqiang, venu en Grande-Bretagne avec plus de 100 hommes d'affaires, a passé avec Nick Clegg, le vice-premier ministre britannique, un accord commercial d'un genre nouveau. Pour obtenir l'autorisation pour Petrochina de reprendre une raffinerie de pétrole géante à Grangemouth en Ecosse (avec 2.000 emplois préservés à la clef), le gouvernement chinois a promis en échange, la location – pour une durée de 10 ans – de deux pandas au zoo d'Edimbourg ! On connait même le nom de ces deux animaux qui vont devoir s'expatrier : Tian Tian et Yangguand, tous deux âgés de sept ans. Rappelons que le panda est une espèce menacée et protégée, avec seulement 1.600 animaux qui survivent dans des réserves naturelles chinoises des provinces du Sichuan, Gansu et du Shaanxi.
Cette "diplomatie du panda" n'est pas nouvelle. A plusieurs reprises, dans des périodes de tensions diplomatiques, la Chine a usé et abusé de ces échanges de pandas avec les pays occidentaux. Une pratique en vigueur aussi bien sous la dynastie Tang que sous la Chine maoïste. Ainsi en 1972 lors de la visite de Richard Nixon, le premier président américain à se rendre en Chine, deux pandas avaient été offerts au zoo de Washington. Mais, au début des années 80, sous la pression des écologistes, ces échanges ont été remplacés par des prêts à long termes à des zoos étrangers. C'est la première fois que le motif d'un tel échange est purement commercial.
Une nouvelle qui a fait bondir Serge Orru, directeur général de la section française du WWF, dont l'emblème est précisément ce sympathique plantigrade, blanc et noir : "Ces pandas vont avoir une singulière odeur de pétrole, confie-t-il à La Vie. Passe encore qu'on l'utilise pour des motifs de coexistence pacifique mais là il s'agit d'encourager une énergie qui est directement responsable du changement climatique et de multiples pollutions". Et, sur leur site en Grande-Bretagne, Ross Minette, responsable scientifique de l'ONG Onekind renchérit : "Les organisations internationales privilégient plutôt une approche qui protège l'habitat du panda et permet à sa population naturelle d'augmenter. Et si le zoo d' Edimbourg est sérieux sur le plan de la conservation, il devrait donner son appui à des projets locaux en Chine". Et d'affirmer : "c'est une affaire commerciale : ces animaux apparaissent comme un cadeau diplomatique, mais en fait, le zoo payera de substantiels droits pour pouvoir les exhiber". Selon les informations du Guardian, ces droits s'élèveraient même à 500.000 dollars par an ! La protection de la nature deviendrait-elle un véritable business écolo ?
"L'humanité ne se définit pas par ce qu'elle crée,
mais par ce qu'elle choisit de ne pas détruire."
Edward Osborne Wilson