L'entrée n'est pas donnée mais cela n'empêche pas l'affluence. « Nous avions tellement besoin de ça » avoue un père de famille.
La guerre et la crise retardent l'arrivée des éléphants, mais les Ukrainiens affluent par une route de campagne défoncée pour voir des lions, des ours et autres paons dans un nouveau zoo privé qui vient d'ouvrir ses portes près de Kiev.
Emerveillée, une fillette de trois ans en robe rose se met sur la pointe des pieds pour mieux observer un tigre du Bengale étendu sous le soleil brûlant dans un coin éloigné de sa cage et imperturbable face à une foule bruyante qui aimerait bien le voir bouger.
Guerre et crise
« Nous avions tellement besoin de ça », s'enthousiasme Evguen, le père de la fillette. « Communiquer avec les animaux distrait des mauvaises nouvelles » si fréquentes en Ukraine depuis le soulèvement populaire sur le Maïdan à Kiev réprimé dans le sang en février 2014 jusqu'au conflit dans l'Est qui a déjà fait plus de 6.400 morts, sans parler de la crise économique gravissime qui frappe de plein fouet les ménages.
Une longue file d'attente de parents avec de jeunes enfants, beaucoup en poussettes, se forme devant les guichets, le parking est plein de voitures et les enfants impatients courent sur l'herbe dans tous les sens.
Entrée pas donnée
L'entrée coûte 150 hryvnias (un peu plus de 7 francs suisses), une somme non négligeable pour une visite en famille en Ukraine où le salaire moyen est inférieur à 200 francs.
« Nous avons décidé de venir dès l'ouverture du zoo. Bien sûr que les temps sont difficiles, mais il faut absolument que les enfants voient des animaux et apprennent », explique Serguï Petrenko, père d'une fillette de six ans, qui porte une casquette et des lunettes de soleil.
Un des plus grands d'Ukraine
Situé près de Demydiv, un petit village plutôt délabré à 40 km de Kiev, le zoo, l'un des plus grands d'Ukraine, s'étend sur 16 hectares et compte des centaines d'espèces d'animaux, des rongeurs de l'Amérique du Sud aux singes de l'Asie du Sud-Est.
Au milieu du zoo trône une villa flanquée de tourelles qui se veut une réplique du célèbre château allemand Neuschwanstein.
Nouveauté par rapport à la plupart des zoos ukrainiens, chaque animal est pris en charge par un zoologue chargé par exemple de changer les couches d'un bébé singe.
Les enfants explosent de joie lorsqu'ils atteignent la zone dite «zoo de contact» où ils peuvent caresser des chèvres, des cochons et un âne.
On demande des girafes
Dans ce havre de paix, rien ne rappelle la guerre, mais ses répercussions se font sentir, reconnaissent à demi-mot les responsables du zoo qui attendent toujours des girafes et des éléphants qui devaient arriver avant l'ouverture.
« Les zoos européens ont peur d'envoyer des animaux dans des pays à problème », se plaint Andriï Levtchyk, le directeur de l'établissement.
« Nous essayons de les convaincre que notre zoo est un endroit absolument sûr et les conditions de vie des animaux sont satisfaisantes », poursuit-il.
Qu'ont-ils mangé ?
Les responsables du zoo de Brno, en République tchèque, qui ont offert deux oursons, Tobi et Kouba, « nous appellent tous les jours pour prendre de leurs nouvelles, pour demander ce qu'ils ont mangé », raconte Nina Saad, directrice du marketing.
L'absence des animaux les plus populaires a légèrement déçu certains visiteurs.
« Nous avons été à l'étranger, nous avons visité des zoos européens. La-bas, cela prend une journée pour tout voir, ici on n'a passé que quelques heures », raconte Natalia, une blonde en robe longue, mère d'un garçon de neuf ans.
Malgré la débâcle
La construction du zoo, lancée il y a deux ans quand rien ne présageait l'éclatement de la crise qui a changé le cours de l'histoire de l'Ukraine, a été menée à bien malgré la débâcle économique du pays.
Le projet a été financé par un homme d'affaires ukrainien peu connu, Mikhaïlo Pintchouk.
Source : Le Matin.
150 hryvnias correspondent à environ 6,30 €.