Avant son retour en Ile-de-France en 2005, l’espèce n’avait pas nidifié dans la région depuis… 1947. Et encore ! Ce n’était pas dans la capitale mais dans une boucle de la Seine. Pour les ornithologues, l’événement est donc considérable : aperçu pour la première fois à Paris en 2011, un couple de faucons pèlerins installé dans le 15e arrondissement vient de donner naissance à trois petits. Une mise au monde dont les préparatifs peuvent être visionnés grâce à un suivi par caméra mis en place en novembre dernier.
Incarnation du dieu Horus dans l’Egypte ancienne, oiseau du tonnerre pour les Indiens d'Amérique du Nord, compagnon des grands de ce monde sur les champs de bataille de notre Moyen Age, le faucon pèlerin a vu ses effectifs chuter drastiquement entre 1945 et 1970, principalement du fait de l’utilisation de pesticides organochlorés. Défendu bec et ongles par le Fonds d'intervention pour les rapaces (FIR) puis par la Ligue de protection des oiseaux (LPO), mais aussi inscrit sur la liste des espèces protégées, il a, en France, échappé de justesse à l’extinction.
« L’espèce recolonise désormais progressivement ses territoires autrefois occupés, mais elle demeure rare et fragile », précise la LPO, dont la mission Rapaces coordonne le suivi par des bénévoles des 700 couples actuellement recensés dans l’Hexagone. Leur priorité : garantir la tranquillité des oiseaux. Et, chaque fois que possible, installer des nichoirs sur les sites artificiels colonisés par l’espèce afin de favoriser sa reproduction.
C’est ce qui s’est passé avec ce couple de jeunes parents, repérés dans Paris à l’automne 2011. Il y a quinze ans, un nichoir avait été installé pour le faucon crécerelle au sommet de la cheminée Beaugrenelle de la Compagnie Parisienne de Chauffage Urbain (CPCU), à quelques centaines de mètres de la Tour Eiffel. D'eux-mêmes, les nouveaux arrivants choisissent de s'y installer. Mais en 2012, leur tentative de reproduction est un échec. L'ancien logement est alors retapé et amélioré, avec l'espoir qu'il leur sera plus favorable... Et cette fois, la réussite est au rendez-vous.
Avec ces trois naissances, le faucon pèlerin offre « un cadeau exceptionnel à la communauté ornithologique », salue la LPO, qui rappelle qu’à Paris, « l’espèce est mentionnée vers 1850 sur la tour Saint-Jacques et vers 1870 dans les tours de Notre-Dame ». Le faucon Falco peregrinus, l’oiseau le plus rapide du monde en piqué (plus de 300 km/h !), va-t-il recoloniser la capitale ? Logé sur des monuments stratégiques, il pourrait alors contribuer à les protéger des fientes de pigeon, espèce dont le rapace se montre friand. Comme dans la ville d’Albert (Somme), dont la basilique néo-byzantine, selon une récente édition du Courrier Picard, devrait prochainement bénéficier de ses services.
C.V.
Source : Le Monde